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Traité simplifié, les nouveaux défis de l'Europe

Article publié dans "Le petit journal.com", le 10/03/2008.

Le Petit Journal : En quoi le traité simplifié relance-t-il le processus européen ?



Jean-Dominique Giuliani
: Le traité simplifié clôt une période d’à peu près 10 ans au cours de laquelle l’Europe a tenté de modifier ses institutions pour tenir compte de son élargissement. Elle a en effet triplé son territoire et est passée de 6 à 27 membres au cours de son histoire. En modifiant les champs d’action et de procédure de ses institutions, l’Europe peut aujourd'hui tourner son regard vers l’extérieur. Face aux sujets de la mondialisation, la politique étrangère, la politique de défense, l’Europe peut désormais apporter une réponse plus rapide, plus adaptée. Le traité de Lisbonne donne une large part à la politique extérieure commune. Cela va permettre de stabiliser les relations internationales et de répondre d’une seule voix aux défis posés par le Moyen Orient et notamment la montée du fondamentalisme musulman.



51 ans après le traité de Rome, quel est  le principal défi à relever ?



Il faut que l’Europe puisse peser sur le plan international autant qu’elle pèse déjà sur le plan économique. Nous représentons le 1er pôle économique du monde avec 20% de la richesse mondiale et un demi-milliard d’habitants. Les Etats de l’Union européenne se réunissent aussi autour de valeurs uniques qui organisent aux plans politique et juridique le respect de la personne humaine. L'Europe est le lieu de la planète où les droits individuels et collectifs sont les plus développés. 



La France a ratifié par voie parlementaire le nouveau traité le 8 février 2008 sans passer par un référendum, provoquant la colère de différents partis politiques. Comment est perçu ce nouveau traité par la classe politique italienne ? 



Sans trop de difficulté. Ce traité ne pose pas de problèmes aux Italiens. J’observe que les principaux partis en lice pour les élections sont européens.



Pensez-vous que les Italiens soient plus pro-européens que les Français ? 



Les Italiens sont peut-être plus facilement ouverts sur le monde que les Français. En tant que pays de tradition maritime, l’Italie a moins peur de l’autre, de la concurrence. Elle a plus facilement vocation à se projeter avec moins de frilosité. La France, pays de tradition rurale est peut-être moins prête à supporter les changements et moins habituée au vent du large !



Pourtant, il suffit de parcourir les journaux pour voir que les Italiens supportent mal l’intégration d’immigrés d’Europe centrale.



L’Europe n’a pas organisé l’immigration alors qu’elle en a besoin. La politique d’immigration commune sera l’un des grands thèmes de la présidence française cette année. Avec le traité simplifié, on va pouvoir décider à la majorité qualifiée. Cela va permettre d’unifier plus rapidement les règles d’immigration. Actuellement, les conditions d’obtention du droit d’asile ou des permis de séjours ne sont pas les mêmes en France et en Italie. Avec une politique d’immigration commune, ce problème peut être résolu.



L’Italie est actuellement en pleine campagne électorale. Dans le cas où Silvio Berlusconi ou Walter Veltroni gagnerait, quelles seraient les conséquences des élections sur le processus européen ?



Cela ne changerait rien. Cela fait longtemps que la politique européenne des Etats membres ne dépend pas de la majorité aux affaires. De plus, les deux formations politiques ne présentent pas de grandes différences sur la conception de l’Europe.



Suite aux entrevues entre Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, le projet d’Union méditerranéenne devrait se faire dans le cadre de l’Union européenne. Qu’en pensez-vous ?



Les pays méditerranéens n’ont pas connu ces dernières années le développement espéré. Le processus de Barcelone, qui date de 1995, a montré ses limites. Ce n’est pas un succès. C’est pour cela que Nicolas Sarkozy a proposé un projet d’Union pour la Méditerranée. On peut comprendre que des pays européens non riverains veuillent y être associés. Dans le cadre de l’Union européenne, ils subventionnent déjà des projets de développement dans les pays du pourtour méditerranéen. Néanmoins, le projet d’Union méditerranéenne permet de remettre en première ligne les pays riverains. La Méditerranée est la mère de la démocratie européenne. Nous devons tout mettre en œuvre pour que la Mare Nostrum redevienne un pôle de culture, de stabilité et de civilisation.





Propos recueillis par Sara FREDAIGUE. (www.lepetitjournal.com - Rome)