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28 mars 2024

Jean-Dominique Giuliani sera un des intervenants lors de La REF Théma organisée par MEDEF. Il abordera le sujet du vieillissement de la population européenne, ses effets sur son économie et les réponses européennes à ce défi.

Le Parlement en quête de crédibilité

Article paru dans Le Figaro le 16 avril 2009 dans le cadre du partenariat entre Le Figaro et la Fondation Robert Schuman pour les élections européennes des 4-7 juin 2009.

Depuis trente ans, les citoyens élisent directement leurs représentants au Parlement européen.



Cette possibilité, longtemps refusée, s'est imposée d'évidence. Les institutions européennes exercent, par délégation, certaines des prérogatives des États. Elles avaient besoin d'une Assemblée légitimée par le suffrage universel direct.



Pour autant, la participation aux six scrutins organisés depuis 1979 n'a pas cessé de décroître, passant en France de 63 % à 45 % en 2004. Cette désaffection ne s'explique pas seulement par la complexité des processus de décision européens. Alors qu'ils réclament plus de transparence, de proximité et de réactivité des instances européennes, les citoyens français préfèrent encore la politique nationale.



Les Français vont élire 72 des 736 députés européens, le 6 juin outre-mer et le 7 juin en métropole, au scrutin proportionnel, comme partout en Europe.



Depuis l'origine, deux grandes familles politiques dominent le Parlement européen : le centre droit et la gauche modérée. Aucune d'entre elles n'a jamais obtenu de majorité absolue et elles ont dû s'entendre pour assurer un bon fonctionnement de l'institution parlementaire européenne, jusqu'à partager le mandat de cinq ans du président ! Cette coopération surprenante, pour des électeurs habitués aux alternances, a affaibli quelque peu l'enjeu d'un scrutin qui reste trop lointain. Elle est d'ailleurs remise en cause par les libéraux et les Verts qui souhaitent plus de clivages dans la politique européenne et contestent cette domination.



Entre le 4 et le 7 juin, tous les pays européens voteront, mais dans un cadre national. De là vient peut-être la principale faiblesse de ce scrutin. Pour cette élection, la France est divisée en huit circonscriptions, différentes de nos découpages administratifs habituels. Les Français ne sont pas familiers de ces nouvelles grandes régions européennes. Ils ne voient pas leurs députés et ceux-ci ont du mal, perpétuellement en déplacement entre Strasbourg et Bruxelles, à tenir permanence, à aller au-devant de leurs électeurs, à rendre des comptes.



Par ailleurs, les partis politiques estiment ne pas pouvoir ignorer la dimension nationale de cette élection et choisissent leurs candidats en fonction de critères internes plutôt que sur leurs qualités à les représenter à Strasbourg et Bruxelles. Aussi nos élus, par ailleurs champions européens du cumul des mandats, peinent-ils souvent à s'imposer dans une Assemblée multinationale où il faut parler les langues étrangères, nouer des alliances et comprendre le jeu européen. Ceux qui y parviennent ne sont pas toujours reconnus chez eux et rarement reconduits alors qu'il faut du temps pour s'intégrer.



Du point de vue de l'intérêt national, ces comportements sont préoccupants car le Parlement européen est devenu un véritable organe législatif. Son influence et ses prérogatives politiques sont déterminantes dans la conduite des affaires européennes.


Il vote et contrôle plus de la moitié des 128 milliards d'euros du budget européen annuel. Il légifère, avec le Conseil, c'est-à-dire les représentants des États, pour près de la moitié d'une législation qui constitue déjà la majorité des normes juridiques applicables en France. Il a ainsi adopté entre 2004 et 2009, 287 règlements et directives.Si la réforme des institutions, c'est-à-dire le traité de Lisbonne, entre en vigueur, il deviendra un législateur à part entière dans presque tous les domaines d'action de l'échelon européen.



D'ores et déjà, son pouvoir de contrôle est considérable sur la Commission européenne dont il doit ratifier la nomination de chacun des membres. Les auditions qu'il organise à cette fin sont redoutées. En 1999, il a provoqué, pour la première fois, la démission d'une Commission européenne. En 2004, il a obtenu deux changements de portefeuilles de commissaires et refusé deux nominations à la Commission Barroso. La crédibilité du Parlement européen, seule institution européenne élue directement par les citoyens, s'accroît donc fortement sans que les débats politiques nationaux en aient toujours conscience.



Fortement engagé dans les combats environnementaux, il n'échappe pas à la démagogie ni aux excès. Soigneusement tenu à l'écart de la politique étrangère et de défense, il n'y a jamais brillé, malgré quelques experts reconnus. Sur les questions économiques et sociales, il a en revanche démontré un savoir-faire et une capacité de décision réelle, loin de la bureaucratie, permettant une véritable expression démocratique sur le temps et les conditions de travail, renforçant les pouvoirs du consommateur et évitant une libéralisation trop idéologique de secteurs stratégiques comme l'énergie. Il y a gagné ses galons d'Assemblée démocratique.



Au fil des ans, le Parlement européen est devenu incontournable au sein des institutions communautaires. Il lui reste à s'imposer dans les débats politiques nationaux. C'est l'un des enjeux du scrutin du 7 juin.



Lien vers le site des élections européennes de la Fondation Robert Schuman