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portrait

Une relation incontournable

Article paru dans "Aujourd'hui en France", le 12/12/2008

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Q: Peut-on parler de fracture dans la relation franco-allemande ?  



Jean-Dominique Giuliani :



C'est un jugement trop rapide. La relation franco-allemande est toujours essentielle, mais elle est en train de changer. Auparavant, les discussions étaient aussi vigoureuses, mais maintenant elles sont publiques parce que c'est le style de Nicolas Sarkozy. La situation des deux pays n'est pas la même. La chancelière dirige une coalition, elle est en cohabitation et en plus dans une année électorale. L'Allemagne vient de passer dix ans à se serrer la ceinture. Elle commençait à en toucher les bénéfices depuis un an : équilibre budgétaire, excédent commercial record de 189 milliards d'euros, et elle est touchée de plein fouet par la crise, beaucoup plus que la France. Ses exportations à la fin de 2008 auront sans doute chuté de 25 % ! Avant d'être un débat franco-allemand, le débat sur la relance économique est d'abord un débat allemand « Peut-être Merkel est-elle aussi un peu jalouse de Sarkozy ».



La relation entre Sarkozy et Merkel est-elle vraiment aussi mauvaise qu'on la décrit ? 



Tout les sépare mais ils ont fini par trouver un modus vivendi. Qu'y a-t-il de commun entre l'avocat gouailleur et la scientifique froide ? Merkel 'est une joueuse d'échecs, elle ne décide jamais sous la contiainte. Et elle a plutôt pas mal réussi même s'il est à la mode de lui taper dessus. Sarkozy,  lui, a bousculé les codes communautaires,  ll veut faire de la politique  et il a raison. Peut-être Merkel estelle  aussi un peu jalouse de Sarkozy.  Elle est d'ailleurs fascinée par son  style, mais c'est un style qui a éliminé  tous les autres...  



Donc, il n'y a pas  de divorce ?  



Non. Il y a eu un divorce sur l'Union  pour la Méditerranée, et finalement  les deux pays ont décidé de se mettre  d'accord... Puis, il y a eu divorce sur  la politique monétaire, sur laquelle  on n'a pas progresse. Mais il n'y a pas  un seul dossier sur lequel il n'y ait  pas un accord franco-allemand  avant les sommets, qu'il s'agisse de  Pimmigration, de l'agriculture et  même du plan énergie-climat Ça  fonctionne mieux que jamais sur le  plan administratif et diplomatique,  mais on n'entend que les craquements  sur le plan politique, parce  que la méthode Sarkozy, c'est de foncer,  quitte à casser un peu de porcelaine  au passage.  



Pourquoi Sarkozy n'aime-t-il  pas l'Allemagne ?  



Il ne connaît pas bien l'Allemagne.  Comme beaucoup de Français d'ailleurs.  Il y a pourtant beaucoup de  traits communs entre nos deux pays :  un grand attachement à une riche  culture, un vrai romantisme, une  réelle énergie au plus profond de nos  peuples. Et nous ne faisons pas assez  d'efforts pour mieux comprendre  les Allemands qui sont aussi de  grands affectifs ! Il faut faire attention  à ne pas exciter nos différences. Elles  sont minimes. Et dans le monde  d'aujourd'hui, l'intérêt de la France  passe par l'Allemagne, l'intérêt de  l'Allemagne passe par la France.  Leur relation est incontournable.  





Propos recueillis par Béatrice Houchard.