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L’Europe doit-elle craindre la dislocation de la Russie ?

[Cet édito est également disponible en ukrainien.]

Bien que demeurent beaucoup d’incertitudes, il ne faut plus désormais exclure la dislocation de la fédération de Russie, qui résulterait de l’agression ratée de l’Ukraine.

Le dernier empire colonial de la planète craque en effet de tous côtés et les très nombreuses ethnies et peuples qui la composent rêvent de prendre leur liberté.

L’Europe aurait tort de redouter un tel évènement aux motifs que la Russie abrite encore près de 6 000 têtes nucléaires et qu’à Poutine pourrait succéder un pire dirigeant. En 1991, lors de la fin de l’URSS, nul n’a pu jouer avec les armes nucléaires et toutes les puissances ont collaboré pour éviter le scénario préféré des cinéastes de la disparition de quelques ogives au profit de groupes criminels ou terroristes. Quant aux kleptomanes aux affaires à Moscou, ils n’ont plus un grand avenir et s’enfuient à l’Ouest.

La fin de la fédération de Russie ne serait que l’aboutissement d’un long processus de décolonisation entamé en 1991, la fin réelle de l’ère tsariste prolongée de la dictature communiste, qui ne survivait que dans la conquête.

Elle ouvrirait à ses voisins d’intéressantes perspectives :

D’abord l’assurance de la paix avec la fin de ce travers séculaire de la Russie à toujours vouloir s’étendre. Cette boulimie de terres du pays le plus étendu du monde avec 17 millions de km2, n’est que la traduction d’une fuite en avant nationaliste indispensable pour contrôler un territoire trop grand et une société si diverse qui compte officiellement près de 100 nationalités.

Ensuite la possibilité de coopérer avec des régions, riches de leurs sous-sols, de leur agriculture et souvent de leur passé industriel, notamment les 21 républiques autonomes, qui, du Tatarstan à la Touva, de la Kalmoukie à la Bouriatie, du Daghestan à la Khakassie, ne cherchent qu’à se développer et s’ouvrir, ce qu’un centre mafieux et prédateur leur interdit depuis si longtemps.

Une véritable architecture de sécurité pour le continent pourrait alors en résulter rejetant la force brutale et le fait accompli. L’Europe pourrait enfin développer des relations normales avec la Russie d’Europe qui louche vers elle depuis toujours sans oser la regarder dans les yeux.

Elle ne doit donc pas craindre ces éventuels bouleversements. Elle doit seulement s’y préparer avec tous les moyens dont elle dispose, il est vrai plus civils que militaires.
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