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Le droit des peuples

Beaucoup ont leur opinion sur l’agression russe de l’Ukraine, ses causes, ses conséquences et les solutions pour l’arrêter.

A l’ouest, où l’on a eu la chance de vivre du bon côté du rideau de fer, on raisonne toujours en termes traditionnels, focalisé sur les relations entre Etats, se trompant d’ailleurs régulièrement, mais en ignorant une donnée fondamentale qui explique tout : les peuples.

A l’est de l’Europe, ceux qui ont le plus souffert de l’occupation et de la tyrannie soviétique, de la dictature communiste liberticide et mortifère, ont unanimement voulu rejoindre la famille occidentale pour éviter le retour de la terreur qui hante chaque personne, tant elle en a décimé.

Ce n’est pas un complot américain ou européen qui a conduit à l’élargissement de l’OTAN, c’est la répulsion, la peur qu’inspire une Russie qui n’a jamais su faire le procès du communisme. Nuremberg avait permis de juger une idéologie et de condamner les bourreaux nazis, d’adopter des lois pour s’en prémunir et d’ainsi permettre le retour de l’Allemagne dans le concert des nations.

Ni le communisme, ni Staline n’ont été jugés et condamnés pour les millions de morts qu’ils ont causées. Poutine n’est que leur petit-fils, survivant improbable d’un appareil sécuritaire qui a mis la main sur le pays le plus étendu au monde. Le peuple russe est pris en otage par quelques oligarques assez minables qui ont fait main basse sur ses immenses richesses et lui interdisent de rejoindre le camp de la liberté. La déstalinisation de la Russie est beaucoup plus nécessaire que la prétendue dénazification de l’Ukraine.

L’histoire de l’Europe ne saurait être réécrite comme le souhaite le dictateur russe.

Aucune logique d’Etat ne pourra ignorer le sentiment des peuples. Ils ont voté pour des régimes démocratiques, qui peuvent certes paraître imparfaits mais qui sont de véritables paradis en comparaison de la Russie d’aujourd’hui.

Aussi doit-on recommander à tous ceux qui, chez nous, imaginent des solutions pour mettre fin au conflit de ne pas oublier que seuls les Ukrainiens décideront de leur avenir. Et ils vont avoir de fortes et légitimes exigences.

Neutralité, dénucléarisation, non appartenance à telle ou telle alliance ? La dernière fois qu’ils ont accepté des conditions de cet ordre c’était en 1994 avec le mémorandum de Budapest, un accord international signé de la Russie, des Etats-Unis, de l’Ukraine et du Royaume-Uni, garanti par la Chine et la France, membres du Conseil de Sécurité de l’ONU. Contre la reconnaissance de ses frontières et un engagement de non-agression, l’Ukraine a accepté de se séparer des 1 900 têtes nucléaires soviétiques présentes sur son sol, qui ont d’ailleurs été rapatriées et détruites en Russie sur fonds américains. On a vu ce qu’ont donné ces « assurances de sécurité » toutes ignorées par les signataires lorsque Poutine a renié sa parole en l’agressant militairement !

On ne saurait donc leur en vouloir d’être particulièrement prudents. Les Ukrainiens n’accepteront de traiter avec l’agresseur qu’avec la certitude qu’il n’y reviendra pas, tant la marque que la Russie a laissé sur les terres de l’Europe est faite de sang, de souffrances et d’horreurs que Poutine continue à répandre.

Ils résisteront donc jusqu’au dernier et il se pourrait bien qu’ils gagnent parce que tout leur peuple est mobilisé, qu’il a le droit de dire ce qu’il veut et ce qu’il ne veut pas. En cela il protège un Occident bien timoré à l’idée d’avoir à faire de même en assumant le risque d’un conflit.
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