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L'Europe face à la crise: encore un effort!

La réunion le 1er mars d'un Conseil européen extraordinaire pour étudier les mesures à prendre pour lutter contre la crise laisse un goût amer.

Des mesures techniques y ont été préparées et c'est une bonne chose. On sait que le rapport de M. de Larosière sur la supervision financière européenne aura des suites concrètes. On comprend que les avoirs "toxiques" des banques pourront être cantonnés dans des structures nationales harmonisées. Les paradis fiscaux ont subi une nouvelle attaque.

Des déclarations d'intentions louables ont été réaffirmées: solidarité avec ceux des Etats membres qui seraient en difficulté, volonté d'utiliser à plein tous les outils déjà à disposition pour soutenir l'économie, refus du protectionnisme et volonté de conclure le cycle de négociations internationales de Doha.

Tout cela est bel et bon, mais est-ce au niveau de l'ampleur de la crise? On peut en douter.



En Europe centrale et orientale, la demande d'un plan de près de 190 milliards d'euros, présentée par le Premier ministre hongrois a été rejetée et d'abord par la...présidence tchèque. Or la situation de ces nouveaux Etats membres est préoccupante. Leurs monnaies sont attaquées et certaines d'entre elles, comme le zloty polonais ont perdu plus de 30% en six mois. Dans cette région, il s'agit tout d'abord de sauvegarder l'essentiel, c'est-à-dire un système financier en état de marche, des monnaies fiables. Malgré un débat contraint sur l'extension anticipée de l'Euro, le message lancé le 1er mars n'est donc pas le bon.

Par ailleurs, ne disposant pas du matelas de richesses que nous avons accumulé, ils risquent de souffrir particulièrement du ralentissement économique prévu en 2009.


Selon les prévisions, le PIB des 27 pourrait reculer d'environ 2% en 2009. Dans certains de ces pays, il s'agira de 20%! Accompagnée d'un recul de l'investissement de près de 6% pour les 27 (parfois 25% chez certains), cette situation conduira à un accroissement insoutenable du chômage et à des désastres sociaux et économiques. En choisissant de "répondre au cas par cas" au motif que les situations de chaque pays sont différentes, l'Union choisit la politique de la rustine plutôt qu'une vision globale de l'économie européenne. C'est une erreur historique qui peut encore être corrigée. Espérons que ce ne seront pas les faits qui l'imposeront.

On sent bien que l'idéologie et l'égoïsme ont pesé lourd sur le Conseil. Certains ne croient toujours pas à l'ampleur de la crise ou refusent de se retrousser les manches. V. Klaus n'a-t-il pas déclaré que "la crise c'est comme une bonne grippe; qu'on la soigne ou pas, il faut attendre 7 jours pour qu'elle passe toute seule".

En outre les Etats membres ne jouent pas le jeu d'une Europe intégrée. Elle l'est au plan monétaire, sur un mode fédéral. C'est ce qui a permis à l'Euro de nous protéger et de sauver notre système financier. Elle ne l'est pas sur le plan budgétaire et chacun annonce son propre plan, la Commission tentant piteusement de les coordonner ensuite. La vraie coordination, c'est avant l'annonce des plans anti-crise, pas après!

La période actuelle offre une occasion unique de progresser vers plus d'intégration économique et budgétaire entre les Etats membres. Il suffirait que la France et l'Allemagne annoncent des mesures communes, pour soutenir un secteur industriel, pour emprunter en commun par exemple, pour que tout le monde comprenne qu'il y a là une volonté politique incontournable. Elles seraient immédiatement rejointes par d'autres et entraîneraient toute l'Europe vers la sortie de crise, car les marchés, les agences de notation, les peuples, comprendraient que rien ne pourrait altérer une telle alliance stratégique qui a les moyens de résister aux difficultés actuelles.

Faute de leadership politique, personne ne semble voir dans les circonstances présentes une opportunité pour intégrer plus vite une Europe qui risque, sinon, de compter de moins en moins dans le monde.

Encore un effort!...

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