[Cet édito est également disponible en ukrainien.]
On voit toujours le verre à moitié vide, même lorsqu'il est à moitié plein !
La spécialité des élites européennes n'est plus de rêver d'une Europe parfaite mais de se lamenter d'une Europe imparfaite.
Cette tournure d'esprit, majoritairement colportée, a un nom, le pessimisme et un prix, le renoncement. Quand on ne croit plus en soi, y-a-t-il encore des raisons d'espérer ?
Qu'arrive-t-il donc au continent, relevé de tant de désastres, de ne plus croire en lui-même et surtout en son destin ?
Car c'est bien de cela qu'il s'agit à entendre les discours critiques envers la construction européenne, alors même que les citoyens disent l'avoir acceptée comme le cadre naturel de l'action publique.
Vieillissement ? Peur de perdre son confort ? Soumission ? Facilité ? Démagogie ?
Nul ne sait vraiment pourquoi tant de responsables s'abandonnent à ce discours défaitiste sur l'Europe qu'ils prétendent pourtant construire.
Oui l'Europe est bien imparfaite. Elle n'est pas encore capable de remplacer nos nations dans l'exercice de la puissance et l'usage de la force.
Oui la construction d'un ensemble politique aux histoires si multiples est un pari fou au regard de l'histoire et son unité paraît un objectif lointain.
Oui l'Europe peine à comprendre et pratiquer le rapport de force.
Tout cela est vrai et faux à la fois.
Les postures impériales ont-elles un avenir dans le monde actuel ? N'appartiennent-elles pas au passé ? La question est plus que légitime.
L'unité politique de l'Europe est loin d'être atteinte mais elle a déjà agrégé une force économique comparable à celle des autres continents.
S'étant construite pour la paix et contre la guerre, l'Europe a du mal avec le rapport de force. On peut le regretter ; c'est plutôt une bonne nouvelle sur la scène internationale.
L'image de l'Europe dans le monde est bien plus positive que beaucoup d'autres ensembles.
Outre ses succès économiques, elle incarne la liberté, l'Etat de droit, la démocratie.
A ceux qui en doutent, suggérons de la confronter à celle de la Russie, de la Chine et désormais même de l'Amérique. Faut-il en effet nous comparer pour nous rassurer ?
Alors, notre devoir n'est-il pas, tous, d'arrêter de discréditer ce que nous nous efforçons de construire, d'en accepter les défauts, de s'atteler à les corriger et, pour cela, même si la voie est difficile, de nous projeter vers l'avenir avec confiance ?
A méditer sans modération.