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Après la Croatie, les pays des Balkans "au milieu du gué" vers l'UE

Papier d'angle publié par l'AFP, Pierre Glachant

La Croatie paraît bien assurée désormais de rejoindre l'UE bientôt, mais les autres Etats des Balkans occidentaux, qui ont tous une perspective européenne, sont loin derrière, "au milieu du gué" entre un passé tumultueux et leur entrée dans l'Union, estiment les analystes. La Commission européenne a proposé vendredi aux Etats membres de l'Union que la Croatie les rejoigne en 2013 et de clore les négociations d'adhésion avec Zagreb. Les autres pays de la région n'en sont pas encore là. Certains  (Bosnie, Macédoine, Albanie, Kosovo) restent fragilisés par des tensions ethniques ou politiques très vives et les réformes à accomplir restent considérables. "Les Balkans sont au milieu du gué", résume l'universitaire français Jacques Rupnik, spécialiste de la région. "Il ne faut pas penser que les problèmes sont réglés si le risque de guerre est écarté (dans les Balkans). C'est prématuré", ajoute M. Rupnik. Selon lui, "il existe des risques de morcellement supplémentaires" dans la région. Il s'inquiète de la "polarisation ethnique renforcée" en Macédoine, entre Macédoniens et Albanais, mais aussi de la situation "complètement bloquée" en Bosnie, ou encore des déclarations récentes de responsables serbes favorables à une partition du Kosovo. L'UE a affirmé solennellement, au sommet de  Thessalonique (Grèce), en juin 2003, que tous les pays des Balkans  occidentaux avaient une perspective européenne. Mais huit ans après,  leur avancée varie. Forte de l'arrestation de Ratko Mladic, l'ancien  chef militaire des Serbes de Bosnie recherché pendant seize ans par la justice internationale, la Serbie compte rattraper son retard et ambitionne d'obtenir en décembre le statut de candidat à l'UE et une  date pour l'ouverture des négociations d'adhésion. Belgrade veut  éviter à tout prix que la "fatigue de l'élargissement" chez les  Européens n'entraîne une pause trop longue pour la Serbie, après le  feu vert donné à la Croatie. Selon une source diplomatique européenne, si le statut de candidat pour la Serbie paraît en bonne voie, Belgrade a encore jusqu'au mois de septembre pour mener à bien plusieurs  initiatives qui lui assureront une date pour l'ouverture des négociations d'adhésion. Belgrade "doit continuer sur la lancée" de la capture de Mladic, en progressant sur trois fronts, ajoute cette source. Il s'agit d'arrêter le dernier inculpé poursuivi par la ustice internationale, Goran Hadzic, un ancien responsable des Serbes de Croatie, de mener plusieurs réformes, dont celle de la justice, en nommant des juges correspondant aux critères européens et en écartant ceux compromis notamment sous le régime de Slobodan Milosevic, et  enfin d'enregistrer des résultats concrets dans le dialogue engagé avec le Kosovo, selon cette source. Le Monténégro, qui est candidat, espère aussi pour décembre une date pour l'ouverture des négociations d'adhésion, et la Commission européenne a laissé entrevoir vendredi un espoir pour la Macédoine, le premier depuis longtemps, en indiquant que Bruxelles pourrait recommander cette année l'ouverture des négociations d'adhésion. Le différend avec Athènes sur le nom de la Macédoine, qui bloque toute avancée depuis 2005, présenterait quelque espoir de solution, selon Bruxelles. L'Albanie, engluée dans un bras de fer politique entre le pouvoir et l'opposition, le Kosovo, encore très fragile, et enfin la Bosnie, bloquée sur le plan institutionnel, paraissent bons derniers dans l'avancée européenne. Jean-Dominique Giuliani, de la Fondation Robert Schuman, un centre d'analyses sur l'Europe, estime que le temps est venu pour l'UE d'affirmer davantage  sa volonté dans les Balkans et de "taper du poing sur la table", en  Bosnie par exemple pour que le pays sorte de son impasse. "L'UE est  condamnée à réussir dans les Balkans", renchérit Jacques Rupnik. Il en  va de sa "crédibilité".